MILK-NEWS

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Chers amis producteurs et productrices de lait, chers sympathisants,

Au fur et à mesure que nous nous enfonçons dans la crise, il est de plus en plus évident que la priorité doit être de s'attaquer réellement à la surproduction de lait, source d'une pression croissante sur les prix.

À ceux qui diront qu'une telle politique constitue un manque de confiance dans le secteur laitier européen de l'après-quotas, je voudrais répondre ceci : il est grand temps que les gens cessent d'associer les intérêts des producteurs de lait à ceux du secteur laitier. Le « secteur » va très bien, merci. Nous pouvons tous lire les rapports des analystes et les comptes des sociétés. Mais pour ceux qui fournissent réellement le lait – donc ceux qui sont à la base de tout ce profit et de toutes ces prévisions optimistes – c'est une toute autre histoire. Ces personnes, du moins ici en Irlande, travaillent depuis plus d'un an sans aucune rémunération pour leur travail et leurs investissements, voire même travaillent à perte. L'ICMSA est donc d'avis qu'il est grand temps que l'on se concentre un peu plus sur les producteurs de lait – la base du secteur – et que l'on se soucie un peu moins de l'industrie de la transformation, des grandes entreprises et du commerce de détail. Il est clair qu'eux en tout cas ne semblent pas trop se soucier de nous.

John Comer, membre du comité directeur de l'EMB et président de l'ICMSA, Irlande

Pas de politique cohérente face à la crise du secteur laitier

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La pression sur les producteurs laitiers est immense. La crise prolongée à laquelle se trouve confronté le secteur avec des prix du lait continuellement à la baisse a épuisé les exploitations laitières dans l’ensemble de l’Europe.

C’est pourquoi il était d’autant plus important que le Conseil des Ministres de l’Agriculture du 18 juillet prenne des décisions efficaces en vue de réduire la surproduction qui caractérise le marché. Or les mesures décidées hier ne vont pas dans le sens d’un changement d’orientation dont le secteur a pourtant cruellement besoin. Au lieu de poursuivre une politique cohérente au niveau européen en offrant à tous les producteurs la possibilité d’une renonciation volontaire de livraison, une grande partie du train de mesures de 500 millions d’euros, soit 350 millions d’euros, a été prévue pour des mesures qui ne sont pas bien définies.

Romuald Schaber, Président du European Milk Board (EMB), exprime sa déception : « Certes la réduction de la production est un des mots-clés utilisés pour promouvoir le train de mesures actuel. On ne s’aventure toutefois pas sur la voie d’une mise en œuvre appropriée. 150 millions d’euros seulement seraient consacrés aux mesures visant à réduire la production. Un montant largement insuffisant vu la gravité de la crise actuelle. »

 

Période de réduction trop brève et pas de plafonnement simultané

En outre, aucun plafonnement des volumes n’est prévu pour les producteurs ne participant pas à la mesure pendant la période de trois mois, trop courte par ailleurs, durant laquelle les producteurs réduisant leurs volumes recevront une compensation financière. Le risque que la baisse de production obtenue soit neutralisée par un surcroît de production des autres producteurs est important ; et il y a dès lors de fortes chances que l’impact sur le prix du lait soit minime, voire imperceptible. Les 14 centimes environ par litre de lait non produit ne suffisent pas non plus comment incitant. Il conviendrait de verser un montant supérieur de façon à inciter un maximum de producteurs à réduire leur production afin d’obtenir le volume escompté.

« La crise qui touche le secteur laitier européen avec des prix parfois inférieurs à 20 centimes par litre de lait est grave et profonde. Une politique cohérente et claire est indispensable pour y faire face », a déclaré Romuald Schaber. Depuis des mois déjà, la Commission européenne et certains Etats membres semblent ignorer cette conclusion. Les mesures décidées hier en sont malheureusement de nouveau la preuve.

Communiqué de presse de 'EMB du 19.07.2016

Le nouveau ministre de Rhénanie-Palatinat empêche une décision unanime des ministres allemands en faveur d'une réduction volontaire de la production

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© wikimedia commons

La conférence extraordinaire des ministres de l'agriculture des Länder allemands s'est tenue le 15 juillet à Bruxelles en raison de la crise persistante dans le secteur laitier. Les ministres de l'agriculture de tous les Länder étaient présents ainsi que le ministre fédéral de l'agriculture, Christian Schmidt, et le commissaire européen Phil Hogan.

 

Le ministre français de l'agriculture, Stéphane Le Foll, avait également été invité mais s'est excusé au dernier moment. Le BDM était représenté à ce rendez-vous important par Romuald Schaber et une délégation sur place. De nombreux ministres des Länder se sont entretenus avant la conférence avec des représentants du BDM. M. Hauck était pressé et n'a pas tiré profit de cette occasion d'une nouvelle discussion. Le ministre fédéral de l'agriculture, M. Schmidt, est entré sans volonté de s'entretenir avec nous.

À l'issue des discussions des ministres, il s'est avéré que la conférence s'était achevée sans qu'on soit parvenu à une décision. La faute en revient au ministre de l'économie, des transports, de l'agriculture et de la viticulture de Rhénanie-Palatinat, M. Volker Wissing. Celui-ci a opposé son veto à une réduction volontaire de la production au motif qu'on ne voulait pas d'un retour aux quotas laitiers. L'unanimité requise n'était donc pas réunie. M. Wissing avait décidé de refuser cette mesure, qui était soutenue surtout par six ministres verts des Länder, mais également par le ministre de l'agriculture de Mecklembourg-Poméranie-Occidentale issu du SPD (sociaux-démocrates), M. Till Backhaus, et son homologue bavarois de la CSU (centre-droit), Helmut Brunner.

M. Till Backhaus était visiblement déçu. M. Backhaus connaît bien la situation des éleveurs laitiers : « Il ne s'agit plus depuis longtemps de difficultés financières passagères mais bien de survie professionnelle et de destins personnels. »

Romuald Schaber, le président du BDM, s'est également montré contrarié et choqué par ce veto. « Au vu de la situation précaire des élevages laitiers, c'est une catastrophe qu'un seul homme politique, récemment arrivé à son poste, torpille le travail préliminaire intense de ses collègues et empêche ainsi d'améliorer efficacement la situation des éleveurs laitiers. »

Il est extrêmement urgent de trouver des solutions concrètes à la crise actuelle du marché pour éviter d'occasionner des dommages encore plus importants aux éleveurs laitiers. Le marché mondial est sursaturé, le prix du lait est au plus bas. Les pronostics prévoient que les pertes dans le secteur agricole s'élèvent à environ 5 milliards d'euros d'ici à la fin de l'année. Même une légère reprise du marché ne doit pas nous faire oublier que cette crise n'est encore absolument pas résolue. Ne pas s'engager davantage et ne pas lutter maintenant n'est pas le bon chemin à suivre. L'avenir des exploitations est menacé ! Les pertes considérables en valeur ajoutée des éleveurs laitiers signifient également des pertes importantes pour l'ensemble de l'espace rural.

Nous avons besoin d'une gestion de crise utile et efficace afin de pouvoir faire face aux crises à venir et pour qu'il soit possible d'agir rapidement et efficacement.

Nadine A. Gund, BDM

Irlande : Appel de l’ICMSA à suspendre immédiatement les négociations pour les accords le libre échange avec le Mercosur ainsi que le PTCI en attendant que les incidences du Brexit soient entièrement clarifiées

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Dans le contexte de l’incertitude qui continue de planer autour du Brexit, le Président de la fédération irlandaise ICMSA, John Comer, en appelle à l’UE pour qu’elle suspende immédiatement les négociations avec le Mercosur, les négociations du TTIP et d’autres éventuels accords de libre échange dans l’attente d’une vision claire des implications du Brexit et leur prise en considération dans tout accord commercial à venir.

Par ailleurs, John Comer a déclaré que tout accord de libre échange en cours, dont les accords antérieurs de l’OMC, devront être examinés et amendés à la lumière de la sortie du Royaume Uni de l’UE.

Le Président de l’ICMSA estime que les implications d’un accord avec le Mercosur pourraient être extrêmement négatives et significatives pour les agriculteurs irlandais, et il est tout simplement inconcevable de pouvoir poursuivre des négociations dans la brume de l’incertitude et la confusion qui entoure le Brexit compte tenu des éventuelles implications directes, telles que des réductions de tarifs douaniers, les importations préférentielles et le statut sensible de certains produits, autant d’éléments qui seront influencés par la relation que le Royaume Uni entretiendra avec l’UE après son départ.

Concernant les accords de libre échange en vigueur, John Comer constate que les accords commerciaux conclus antérieurement contenaient des concessions substantielles à certains pays tiers, justifiées par leur relation commerciale historique avec le Royaume Uni, mais que ces accords commerciaux avaient été conclus alors que le Royaume Uni faisait partie de l’UE. Il estime tout à fait inacceptable que ces concessions puissent se maintenir après le Brexit et, logiquement, ces accords commerciaux devront être amendés à la lumière de la nouvelle réalité. Pour illustrer son propos, il prend l’exemple de viande d’agneau néozélandaise et constate que les agriculteurs irlandais sont dans un monde bien suffisamment incertain suite au Brexit que pour ne pas devoir concurrencer sur les marchés de l’UE des produits dont la présence est l’aboutissement de concessions accordées dans le prolongement d’une relation commerciale historique entre la Nouvelle-Zélande et le Royaume Uni.

Il conclut que le vote sur le Brexit a soulevé un nombre important de questions très sensibles dont les répercussions sur les accords commerciaux existants et à venir devront être traitées en toute clarté et équité dans le cadre de la nouvelle réalité.

Communiqué de presse de l’ICMSA

Les coûts actuels exercent toujours une pression désastreuse sur les producteurs de lait

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© MEG Milchboard/EMB

Le scénario manque peut-être de quelques agresseurs surnaturels du genre zombies et spectres, il n'en reste pas moins que le sort des producteurs de lait partout en Europe s'apparente véritablement à un film d'horreur : mois après mois, les annonces désastreuses se succèdent concernant les prix, le fossé s'élargit entre les coûts de production et les prix de vente et dans les élevages, la menace se précise sur des familles d'agriculteurs au bord du désespoir.

 

Force est de constater, à la lecture des chiffres pour la production laitière allemande au mois d'avril, qu'avec un prix moyen de 25,78 centimes, il n'est même pas possible de couvrir deux tiers des coûts de production qui dépassent 44,6 centimes par kilo de lait. Ces statistiques sont relevées chaque trimestre par le BAL (Büro für Agrarsoziologie, Bureau pour la sociologie agricole et l’agriculture) et publiées conjointement par le MEG Milch Board et l'EMB (European Milk Board).

Les études concernant les coûts menées pour les autres pays européens mettent en évidence qu'il ne s'agit ni d'un problème passager ni d'une conjoncture spécifique à l'Allemagne. A titre d'exemple, au début du mois de juillet, les statistiques de coûts pour le Danemark et les Pays-Bas illustrent clairement que même les pays disposant de grosses structures laitières essuient un déficit constant. En 2015, avec des coûts moyens avoisinant 41,70 centimes, le Danemark a perdu plus de 10 centimes tandis que les producteurs hollandais ont enregistré un déficit de 14 centimes par kilo de lait avec des coûts culminant à 44,50 centimes. Même ces dernières années, les prix aux Pays-Bas n'ont jamais atteint un niveau rémunérateur.

« L'impossibilité permanente de couvrir leurs coûts contraint les agriculteurs et les agricultrices à puiser dans leurs propres poches pour assurer un subventionnement interne de la production. Pour ce faire, ils renoncent à percevoir une rémunération sur leur temps de travail et contractent des emprunts dans l'espoir de sauver encore un certain temps la production et la ferme », explique le Président de l'EMB, Romuald Schaber, pour décrire l'énorme pression qui pèse sur les élevages laitiers. Et si même ces sacrifices ne suffisent pas, de nombreuses exploitations abandonnent la production de lait. Selon Romuald Schaber, il est urgent de se poser la question suivante : « Pouvons-nous réellement traiter aussi injustement ceux qui produisent nos denrées alimentaires et permettre, en plus, que la production disparaisse purement et simplement de nombreuses régions européennes ? »

L'évidente réponse négative à apporter à cette question appelle, de façon tout aussi évidente, une deuxième question, celle des possibilités de remédier à ces circonstances injustes. « Pour ramener les prix à un niveau équitable, la production laitière doit être réduite sur le marché », avance Romuald Schaber en esquissant la solution pour la filière laitière. « Les éleveurs laitiers qui sont prêts à brider leur production devraient recevoir une compensation financière. Car leurs efforts contribuent à une stabilisation du marché qui s'avère profitable à tous les producteurs puisqu'elle s'accompagne d'une hausse des prix. »

De nombreuses voix s'élèvent pour réclamer une telle renonciation volontaire des livraisons à l'échelon européen afin de mettre un terme à la conjoncture désastreuse dans le secteur laitier. Les ministres de plusieurs Etats-membres de l'UE, des eurodéputés et le Comité des Régions font partie de ces voix. « Il est absolument essentiel que la Commission se joigne à cette revendication », estime Romuald Schaber.

 

Contexte :

L'étude concernant les coûts commandée conjointement par le European Milk Board (EMB) et le MEG Milch Board auprès du BAL (Büro für Agrarsoziologie & Landwirtschaft, Bureau pour la sociologie agricole et l’agriculture) calcule les coûts de production du lait sur la totalité de territoire allemand. Elle se fonde sur des données du RICA (Réseau d'information comptable agricole) de la Commission européenne, utilise aussi, à des fins de mise à jour, les indices des cours d'intrants agricoles tels que le fourrage, les engrais, les semences et l'énergie publiés par l'Office fédéral de la Statistique allemand et intègre un paramètre des revenu qui calcule le travail presté par le chef d'exploitation et les membres de sa famille.

En s'appuyant sur cette étude, le MEG Milch Board a mis au point le MMI (Milch Marker Index) qui suit l'évolution actuelle des coûts de production (année de référence = 2010 = 100). Pour le mois d'avril 2016, l'indice MMI affiche 107 points. Cet indice est publié tous les trimestres en compagnie d'un ratio prix/coûts. Ce ratio illustre le rapport entre les prix du lait cru versés aux producteurs et officiellement recensés et les coûts de production.

Communiqué de presse de l'EMB du 15 juillet 2016

Critique de l'évaluation du marché laitier allemand présentée par les professeurs

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© Marlene Herzog/Bauernstimme

Dans une publication du Kasseler Institut für ländliche Entwicklung (Institut pour le développement rural, Kassel, Allemagne), le professeur Onno Poppinga critique sévèrement les arguments mis en avant dans le document  « Réintroduction des quotas laitiers pas un instrument judicieux de la politique agricole » présenté par neuf économistes agricoles allemands. Voici un extrait de la critique du professeur Poppinga:

 

1. Les professeurs suivent une approche théorique inappropriée. Constamment dans cet avis, des concepts d'économie de marché sont avancés en guise d'argument ; lors de l'analyse des relations entre les producteurs de lait et les laiteries, nous ne sommes, en l'occurrence, pas en présence d'un mécanisme de marché mais uniquement d'une relation d'approvisionnement. Les acheteurs (principalement des grossistes et des détaillants alimentaires) ont évidemment connaissance du fait que les laiteries se contentent d'« imputer » le lait alors qu'elles ne l'ont pas acheté. Ainsi les laiteries occupent une position extrêmement faible lors des négociations.

2. Contrairement à l'argumentaire des professeurs en économie agricole, les revendications en faveur d'une modification des fondements juridiques de la relation entre les producteurs de lait et les laiteries de façon à ce que les producteurs de lait se réunissent en groupements de producteurs et puissent ainsi négocier les volumes et les prix du lait avec les laiteries ne visent nullement une « sape du marché » mais posent, au contraire, les premières pierres de l'édification d'un marché. Il est également incorrect de qualifier de tels regroupements de producteurs de lait d'« inadmissibles au titre du droit de la concurrence » : Le droit de la concurrence prévoit expressément ces organisations de producteurs dans l'agriculture et leur reconnait le droit de convenir de règles communes relatives aux quantités, aux prix et à la qualité.

3. En guise d'objection au recours à une réduction de la production pour résorber l'excédent laitier, les neuf professeurs avancent l'affirmation suivante : « Une réduction de l'intensité d'affouragement est contestée du point de vue de la physiologie animale car des problèmes de santé peuvent se poser chez les animaux. » Cet argument est sans fondement. Exemples : La substitution du « lactoremplaceur » dans l'alimentation des veaux par du lait entier, une petite diminution de fourrages (céréales, soja) et le remplacement par la ration de base.

4. Les affirmations des professeurs d'agronomie au sujet des répercussions de la chute actuelle des prix versés aux producteurs de lait sont nébuleuses et ne sont pas de nature à résoudre les problèmes économiques dans les exploitations.

5. Les professeurs d'agronomie avancent des arguments « moraux » à l'encontre de la revendication portant sur le recours à une diminution de la production afin de résorber l'excédent laitier : « Indépendamment du fait que créer artificiellement une pénurie de denrées alimentaires n'aurait aucun sens... » A contrario : Quel sens y aurait-il à produire plus de denrées alimentaires pour lesquelles il n'existe pas de marché supplémentaire où les deniers publics devraient être mobilisés pour assurer, entre autres, le stockage et la fourniture de liquidités d'urgence ?

6. En revanche, force est de reconnaître la pertinence de l'affirmation selon laquelle « le débat actuellement mené dans les médias au sujet de la tension qui règne sur le marché du lait... va au-delà de la recherche de solutions à court terme. » En fait, l'argumentaire développé par les neuf professeurs n'est porteur d'aucune solution durable. Leur proposition s'articule autour de la poursuite de l'industrialisation de l'élevage laitier ; dans les seuls endroits où des marchés de niche se développent et où des « services écologiques » spécifiques sont exigées, des versements directs seraient garantis aux agriculteurs via la promotion, entre autres, du pâturage d'été, du lait de pâturage, du lait au foin. Au contraire, il faut s'appuyer sur le fait que la poursuite de l'industrialisation ne résoudra aucun des problèmes actuels : Les élevages laitiers resteront des fournisseurs dénués de pouvoir d'influence ; le bétail devra, plus que jamais, vivre tout au long de l'année confiné dans une étable (surpeuplée en raison des coûts) ; la course à la performance poussera l'élevage laitier à entrer, de plus en plus, en concurrence avec les humains pour la production alimentaire ; la concentration des animaux dans de grandes étables exacerbera les problèmes liés aux gaz nocifs pour le climat et aux excédents de fertilisants.

Le texte de la « Critique de l'évaluation présentée par les professeurs » du professeur Poppinga peut être consulté dans son intégralité ici (en allemand)

Prof. Dr. Onno Poppinga, Institut de Kassel pour le Développement rural

Producteurs laitiers allemands et africains : « Tu n’es pas un producteur laitier, tu es un vendeur de lait en poudre »

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© Kerstin Lanje

« Tu n’es pas un producteur laitier, tu es un vendeur de lait en poudre », dit un jeune propriétaire de laiterie, sûr de lui, de Bobo-Dioulasso au Burkina Faso lorsqu’il salue un participant allemand de notre groupe.

Il aborde ainsi directement la raison même de notre voyage au Burkina Faso : nous sommes ici pour constater les répercussions du lait en poudre européen et de la stratégie européenne en matière d’exportations sur le Burkina Faso. Nous, c’est une délégation de la confédération européenne des organisations de producteurs de lait, le European Milk Board, et des représentants d’organisations non-gouvernementales allemandes.

Au Burkina Faso, pays comptant 10 millions de vaches pour près de 17 millions d’habitants, la production laitière, les conditions de production et les prix payés aux producteurs sont aussi un sujet controversé. La production laitière est essentielle pour la survie des peuls, éleveurs et bergers traditionnels de cette région. Au même moment, depuis la fin du régime des quotas en Europe, des quantités de plus en plus importantes de lait en poudre arrivent en force sur le marché mondial et au Burkina Faso. Le Burkina Faso importe, chaque année, du lait en poudre pour une valeur de quelque 130 milliards de francs CFA, soit près de 198 millions d’euros. Rien qu’au Burkina Faso, les importations de lait en poudre enrichi ont augmenté au cours de ces cinq dernières années pour atteindre plus de cinq mille tonnes.

A Ouagadougou, nous rencontrons Korotoumou Gariko. Cette femme énergique est une pionnière dans le domaine des micro-laiteries au Burkina Faso. Elle produit du lait et le transforme depuis 1987 ; en 2001, elle créait, ensemble avec d’autres femmes, la « Table ronde sur le lait » dans le but d’accroître leurs ventes. La production laitière est ici entièrement entre les mains de femmes ; 95 pour cent du lait burkinabé est produit par les femmes. « Lorsque la production laitière devint lucrative, les hommes s’y sont tout à coup intéressés et voulaient devenir membres de notre coopérative. Mais nous sommes parvenus à empêcher cela », dit-elle en riant. Il est important pour les femmes d’être indépendantes. La position des femmes dans la société s’est améliorée depuis qu’elles subviennent aux besoins de leur famille. Lorsqu’est posée la question des importations de lait en poudre, Korotoumou Gariko se fâche : « Notre politique prend une mauvaise direction. Les échanges commerciaux de lait ne se déroulent plus que sur le marché mondial. Le Burkina Faso met ainsi sa propre alimentation en jeu. Il faudrait une politique qui promeuve l’ensemble du secteur laitier afin que tous les producteurs puissent accroître leur production et obtenir un bon prix. Cela ne peut pas fonctionner si les importations de lait en poudre bon marché en provenance d’Europe nous font concurrence. » A l’heure actuelle déjà, la poudre de lait coûte la moitié du prix du lait local ; nous en trouvons partout de petits sachets, sur les marchés et dans les kiosques. Le lait fabriqué à partir de poudre de lait et de matière grasse végétale coûte quelque 34 centimes alors que le prix du lait local se situe entre 76 centimes et 1,10 euro.

On demande souvent à Christoph Lutze et Johannes Pfaller, producteurs laitiers qui nous accompagnent au Burkina Faso, pourquoi ils font ce voyage. « Nous ne voulons pas que nos problèmes soient exportés. L’Europe doit entreprendre quelque chose pour gérer les volumes. Celui qui empêche d’autres pays de se développer, entrave son propre développement », dit Johannes Pfaller. Il a lui-même une exploitation de 120 vaches sur une superficie de 100 hectares, et il produit annuellement près d’un million de litres de lait. Depuis la crise du lait de 2009, Johannes Pfaller est très engagé dans la Fédération allemande des producteurs laitiers BDM (Bundesverband Deutscher Milchviehhalter). Christoph Lutze, producteur du nord de l’Allemagne, écoute et opine de la tête. « Apprendre à connaître les producteurs laitiers du Burkina Faso, est important pour moi ; je veux voir de mes propres yeux comment ils vivent. » Nombre de producteurs du Burkina Faso ne peuvent croire qu’il existe, en Allemagne, des exploitations de 160 vaches – comme celle de Lutze – qui doivent de plus en plus souvent se battre pour survivre.

Kerstin Lanje, Misereor

Extrait du Blog de Kerstin Lanje (Misereor)

Il est possible de demander aux participants au voyage de faire des exposés à l’occasion des manifestations agricoles. N’hésitez pas à prendre contact avec le Bureau de l’EMB ou directement avec Monsieur Johannes Pfaller.

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