Le 17 mars, la fédération néerlandaise Dutch Dairymen Board (DDB) a organisé dans la commune néerlandaise Eemnes un colloque portant le titre "Plus forts ensemble". L'événement, auquel des orateurs de haut rang ont participé, prévoyait un programme particulièrement intéressant. Les membres du DDB eurent ainsi l'opportunité exceptionnelle de pouvoir participer à une discussion intersectorielle avec différents groupes d'intérêt et de responsables du secteur laitier, tels que le président et le vice-président des trois plus grandes laiteries des Pays-Bas, des managers de l'industrie laitière, des représentants de l'organisme néerlandais pour le marché des produits laitiers, des scientifiques ainsi que des fonctionnaires du ministère de l'agriculture des Pays-Bas. Le comité directeur du DDB est fier de cet événement très réussi qui a eu du succès auprès d'un public très large.

Développement positif du marché

Tant le vice-président de l'organisme néerlandais pour le marché des produits laitiers, Monsieur Kees Wantenaar, que le secrétaire général de l'Association laitière européenne (EDA), Monsieur Joop Kleibeuker, ont parlé de manière positive des perspectives d'avenir du secteur laitier. La raison principale en serait, selon eux, une plus forte augmentation de la demande de lait comparé à l'offre, dû au niveau de vie de plus en plus élevé de la population mondiale. Monsieur Kleibeuker souligna que la taille du "camembert" de la vente de lait issu des Pays-Bas et d'Europe devrait s'agrandir. Sous certaines réserves, cela serait encore plus important que la distribution proportionnelle du "camembert".

Le DDB ne conteste même pas la supposition que les perspectives d'avenir du secteur laitier européen soient bonnes vu la croissance de la population mondiale. Ce n'est cependant pas une garantie pour les producteurs qu'ils recevront, grâce à cette croissance, leur "part du camembert". Malgré que l'industrie laitière des Pays-Bas ait enregistré une forte croissance en termes de rendement, de production et de taille au cours des dernières décennies, la situation financière des producteurs de lait s'est considérablement détériorée. Depuis dix ans, le prix du lait payé aux producteurs ne couvre pas les coûts de production. Les dettes des producteurs laitiers néerlandais auprès de la Rabobank ont plus que doublées durant cette période, pendant que le retour sur les capitaux propres est tombé à zéro.

Prix du lait et prix de revient 

Les prévisions présentées par Monsieur Poppe de l'institut des sciences agronomiques de l'Université de Wageningen aux Pays-Bas montrent que le prix du lait couvrant les coûts complets de production ne va faire qu'augmenter dans les années à venir. Une raison de plus pour faire en sorte qu'un prix juste soit payé aux producteurs de lait. Selon Madame Greetje van Heezik, spécialiste dans le droit de la concurrence et de l'organisation du marché européen au cabinet d'avocats Houthoff Buruma, les chances d'atteindre cet objectif ont augmenté, grâce aux nouvelles propositions de réforme de la politique agricole commune (PAC), prévoyant de nouvelles possibilités pour des organisations de producteurs au delà de celles qu'offre le "paquet lait" actuel.

Appel 

Dans son exposé, le DDB a explicitement fait appel à tous les acteurs de la filière de toujours prendre en compte, lors de pourparlers avec des responsables politiques à Bruxelles, les intérêts de l'entièreté du secteur laitier, au-delà de leurs propres demandes.  

Ceci contribuerait effectivement, par des règles du marché justes et transparentes, à ce que tous les acteurs du marché puissent bénéficier des mêmes conditions de concurrence et donc d'un revenu juste. En outre, cette approche constitue la base pour un fonctionnement de l'économie durable et responsable d'un point de vue social, tant aux Pays-Bas qu'au niveau de l'Union européenne.

Surveillance de la chaîne d'approvisionnement

Il est absolument nécessaire d'instaurer une agence de surveillance qui analyse et supervise le développent des prix et des coûts de production du lait, afin de pouvoir évaluer si les changements dans la politique laitière de l'UE contribuent à améliorer la situation des producteurs. Le président de la coopérative Deltamilk, Teunis Sterk, a souligné clairement qu'en dehors de cela, les membres de coopératives doivent également prendre leurs propres responsabilités pour améliorer leur situation.

Discussion

Pendant la discussion animée qui eut lieu à la fin du colloque, un des participants soutenait que les plus grands ennemis des producteurs laitiers se trouvaient à cet instant dans la même salle. Cela a provoqué la réaction d'un autre membre du DDB qui répliqua que le plus grand ennemi des producteurs laitiers était plutôt l'agriculteur qui, au lieu de se rendre au colloque, était resté chez lui pour travailler le samedi lorsqu'eut lieu l'événement. Et il a raison: seulement si nous nous sentons responsables de notre avenir en tant que producteurs de lait et que nous nous engageons, nous avons une chance de pouvoir faire valoir nos intérêts.

Sieta van Keimpema (Présidente du DDB et vice-présidente de l’EMB)

Le European Milk Board (EMB) enverra une lettre aux ministres de l'agriculture de l'Union européenne, aux députés du Parlement européen ainsi qu'aux députés des parlements nationaux. Dans sa lettre, l'EMB signale que l'augmentation d'un pour cent des quotas laitiers prévue pour le premier avril 2012 n'a pas de sens*. Il y a déjà une pression considérable sur les prix payés aux producteurs dans toute l'Europe. Une augmentation supplémentaire des volumes produits ne ferait qu'empirer la situation sur les marchés.

A l’attention des Ministres de l’Agriculture de l’Union européenne,

des députés des parlements nationaux et

des députés du Parlement européen,

Hamm, le 22 mars 2012

Le paquet laitier adopté est un premier pas dans la bonne direction – poursuivez sur votre lancée!

Mesdames et messieurs les ministres,

Mesdames et messieurs les députés,

Le paquet laitier qui vient d’être adopté constitue une première avancée vers une réforme durable de la filière du lait en Union européenne. En notre qualité de représentants des producteurs de lait européens, nous tenions à vous remercier. Grâce à ce nouveau règlement, quelques étapes porteuses d’avenir ont été franchies, qui doivent désormais être suivies d’une mise en œuvre et d’une consolidation toutes deux cohérentes. Sinon, ces mesures demeureront tout simplement lettre morte.

Nous souhaitons souligner, avant tout, le caractère positif de la possibilité désormais donnée aux éleveurs laitiers de se regrouper au sein d’organisations de producteurs ainsi que la possibilité, pour les producteurs et les transformateurs, de passer des contrats obligatoires qui pourront contribuer à rééquilibrer les relations asymétriques entre les acteurs du marché du lait. Nous saluons également la prochaine création d’un mécanisme de surveillance des prix.

Cependant, ces mesures ne produiront leurs véritables effets que si elles sont adaptées à la réalité du marché. Cela signifie, entre autres, que les possibilités de regroupement doivent être étendues aux sociétaires des coopératives et qu’une obligation de contractualisation doit, par ailleurs, être instituée sur la totalité du territoire de l’Union et tenir compte des coûts de production pour les éleveurs laitiers. Autrement, les règles convenues ne contribueront pas à améliorer la position des producteurs de lait sur le marché.

Le mécanisme prévu de surveillance des prix doit être mis en place aussi rapidement que possible et doit être, non seulement, investi d’un pouvoir de surveillance du marché du lait (prix, offre, demande et coûts de production) mais recevoir des compétences effectives de régulation dans le souci de prévenir la production d’excédents nuisibles au marché. A elle seule, une surveillance des prix ne suffit pas. Il importe, par ailleurs, de garder un œil sur les marges. Entre les mois de juillet 2010 et 2011, le prix des intrants nécessaires à la production de lait a grimpé de 10-15 % dans de nombreux pays européens. En d’autres termes, les coûts moyens de production du lait dépassent désormais largement les 40 centimes d’euro.

L’absence d’autorégulation du secteur laitier a pu être constatée au cours des dernières semaines, voire des derniers mois, sur l’ensemble du territoire communautaire. A vue d’œil, la pression s’est accentuée sur les marchés, avec pour preuve la chute vertigineuse des prix versés aux producteurs. Rien qu’en Belgique, le prix de base est passé, entre les mois de décembre 2011 et mars 2012, de 29,84 à 28,50 centimes d’euro. Quelques laiteries françaises ont déjà annoncé qu’en avril 2012, le prix versé pour le lait chuterait à 27,5 centimes. Les autres etats-membres n’échappent pas à cet effondrement. Pendant ce temps, les producteurs restent privés de tout moyen de réaction adéquate à ces imprévisibles signaux du marché. Et les livraisons de lait atteignent, comme précédemment, des sommets.

Il importe, dès lors, de suspendre, pour l’instant, la hausse de 1 % des quotas programmée pour le 1er avril 2012 afin de ne pas saturer, encore plus, les marchés ! Il est absolument indispensable de prendre une telle mesure afin de freiner, dans l’immédiat, une nouvelle chute des prix.

Nous vous enjoignons d’œuvrer en ce sens. A mi-parcours, durant la campagne laitière, une nouvelle analyse de la situation du marché peut être entreprise dans le but d’évaluer les effets de la mise entre parenthèses du relèvement des quotas.

Nous vous prions d’accepter, mesdames et messieurs les ministres, mesdames et messieurs les membres de la Commission européenne, mesdames et messieurs les députés, nos salutations distinguées.

* L'augmentation actuelle des quotas laitiers se base sur une décision des ministres de l'agriculture de l'UE du 19 novembre 2009 portant sur une augmentation des quotas laitiers de cinq pour cent jusque 2012, correspondant à une augmentation d'un pour cent par an à partir de 2009.

Lettre ouverte de l’EMB

Le 22 avril de cette année auront lieu en France les élections présidentielles. Un possible deuxième tour est prévu le 6 mai. Dans ce contexte, l'Association des Producteurs de Lait Indépendants (APLI) a écrit une lettre ouverte au Président Nicolas Sarkozy.

Dans cette lettre, l'APLI attire l'attention sur les problèmes pressants concernant la contractualisation entre producteurs de lait et laiteries. Cette pratique avait été rendue obligatoire par arrêté ministériel le 10 décembre 2010. Les producteurs de lait revendiquent que la situation économique précaire qui en résulte soit reconnue et qu'une solution soit trouvée. Les producteurs de lait français et leurs familles doivent à nouveau être à même de vivre dans des conditions dignes et acceptables d'un point de vue économique.

Une des critiques des producteurs au sujet du contenu des contrats est que ceux-ci doivent être conclus pour une durée minimale de 5 ans, sans pour autant garantir un prix à la production minimum couvrant les coûts de production ainsi qu'une rémunération. Les producteurs se voient ainsi relégués dans une position de "réserve économique", permettant aux autres acteurs d'économiser des coûts lorsque la situation économique est mauvaise.

De plus, ils craignent que les banques pourraient exiger une durée minimale de 15 ans comme garantie et qu'elles ne donneraient des crédits que lorsque cette condition serait remplie. L'agriculture dans son ensemble, mais également des biens culturels connexes tels que la cuisine française - reconnue patrimoine culturel par l'UNESCO- feraient dorénavant partie de l'histoire.

Dans leur lettre, les producteurs de lait posent également la question ce que le statut de membre d'une coopérative agricole représenterait encore à l'avenir: les coopérateurs pourront-ils encore décider librement ou seront-ils des agents contractuels liés pendant des années? Les grandes coopératives françaises ont convenu entre elles que dorénavant elles ne proposeraient plus que des affiliations de 5 ans. En fait, il n'y a jamais eu, préalablement à l'introduction des contrats, une vraie discussion entre les producteurs et les coopératives laitières ou les laiteries privées sur le contenu des contrats ou les compromis que ceux-ci impliquent.

Les producteurs se prononcent aussi contre des organisations de producteurs obligatoires telles que prévues par le gouvernement français. Ils considèrent ainsi un engagement contractuel de cinq ans comme exagéré et ne veulent pas en pus devoir prendre en charge les coûts administratifs et les frais de personnel supplémentaires d'une telle organisation.

Association des Producteurs de Lait Indépendants (APLI)