Bulletin EMB Décembre 2011
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Chers éleveurs, chers lecteurs,
Toutes les organisations membres ainsi que le comité directeur de l’European Milk Board (EMB) ont tenu ces dernières semaines et ces derniers mois un grand nombre d’entretiens avec des députés européens pour leur expliquer la réalité des exploitations et les positions de l’EMB. Il est triste de constater que la plupart d’entre eux vivent et pensent dans un univers entièrement différent et bien loin de la réalité agricole. Quasiment tous les parlementaires se sont toutefois montrés ouverts et reconnaissants de pouvoir entrer en contact direct avec des producteurs agricoles non seulement de leur propre pays mais aussi d’autres pays européens.
Moi-même, il y a quelques mois encore, je jugeais superflu ce type de contact avec les parlementaires. Et moi qui ai toujours vivement critiqué les lobbyistes, j’ai été bien obligé de constater que ne pas tenir ces entretiens signifie laisser le champ libre à la COPA, aux grands groupes et notamment aux laiteries. Nous devons faire comprendre à la classe politique que ces organisations ne défendent pas les intérêts des producteurs. Qu’elles sont plutôt intéressées à nous rendre dépendants sur la durée.
Ces dernières semaines, le comité directeur de l’EMB a également tenu des entretiens avec les Ministres de la République tchèque, du Luxembourg, de Belgique, d’Allemagne et de Pologne. Nous avons clairement fait comprendre que nous avons besoin à l’avenir de prix rémunérateurs et que la régulation du marché laitier (selon le concept de l’EMB) est à cet effet une condition indispensable. J’ai été particulièrement effrayé par la faible position de la Ministre allemande de l’agriculture, Madame Aigner. Elle semble persuadée que les producteurs agricoles allemands sont dans une super situation au sein de l’Europe. Et j’avais l’impression que ce n’était pas elle mais ses secrétaires d’État qui déterminaient la politique agricole allemande.
J’ai dû constater que de nombreux Ministres soutiennent un grand nombre de nos positions mais ne sont pas disposés à prendre officiellement position dans ce sens. Cela me semble symptomatique pour l’ensemble de la politique européenne. J’ai fini par comprendre qu’ici était aussi la raison pour laquelle il nous faut toujours et encore organiser des actions (même si uniquement symboliques) pour ainsi faire pression sur la politique. Quand un Lars Hoelgard, comme cela a été le cas en Autriche lors de l’assemblée générale des membres de l’IG-Milch, annonce publiquement qu’une grande partie des producteurs laitiers du Danemark sont en faillite, c’est bien la preuve que la politique d’un Fischer-Boel, d’un Rasmussen et d’un Hoelgard a échoué.
Le comité directeur de l’EMB continuera de se battre au nom des producteurs et je suis certain que nous pouvons continuer à compter sur votre soutien. Une chose doit être claire pour tous : quelles que soient les décisions qui seront prises les prochains mois à Bruxelles sur le paquet lait et sur l’organisation du marché de la nouvelle PAC, ce n’est qu’en 2015 que se verra la voie prise par la politique laitière de l’UE et donc la production laitière en Europe. Nous continuerons notre combat sans relâche et si nécessaire, nous nous rendrons de nouveau à Bruxelles pour y engager des actions.
Je vous souhaite à tous de Joyeuses journées de décembre.
Très cordialement,
Erwin Schöpges, comité directeur de l’EMB
Actions réussies : « Non pas brader les excédents de beurre mais les éviter »
Plus d’une soixantaine de producteurs se sont rendus le 29 novembre 2011 à la frontière germano-suisse à Bâle pour montrer que des deux côtés de la frontière on est opposé au dumping à l’exportation bradée du beurre. Cette action avait pour contexte l’envoi depuis la Suisse vers l’Allemagne et la France de produits allégés à base de beurre. Les éleveurs suisses y sont deux fois de leur poche : en obtenant des prix bas pour leur lait et en versant des prélèvements obligatoires supplémentaires pour la subvention des exportations. Dans les États européens, mais aussi dans le monde entier, ces volumes supplémentaires peuvent entraîner des distorsions sur les marchés déjà saturés et ainsi faire encore baisser les prix à la production. La première cause de ce problème est la surproduction en Suisse et dans l’UE, c’est-à-dire le manque d’une régulation efficace des volumes de lait qui serait gérée par les producteurs.
Les intérêts des producteurs de lait escamotés dans le nouveau paquet laitier
L’accord sur le paquet laitier entre la Commission, le Parlement et le Conseil des Ministres ferme totalement les yeux sur le sort des producteurs de lait. « Les producteurs de lait européens sont amèrement déçus », confie Romuald Schaber, Président de l’EMB, en réaction à l’annonce des résultats actuels des pourparlers entre la Commission, le Parlement et le Conseil des Ministres au sujet de la réforme du marché du lait. Ces décisions sont à mille lieues de concrétiser l’objectif de renforcement de la position des producteurs. Pas de contrats obligatoires, pas de possibilité d'être membre en deux organisations de producteurs en même temps, des plafonnements du regroupement des producteurs trop bas et pas d'agence de monitoring adapté. Juste pour le fromage, qui bénéficie d’une appellation d’origine protégée (A.O.P.) une régulation de l’offre serait possible. Le Parlement européen votera sur le paquet laitier présenté à la mi-février.
600 producteurs laitiers à l’assemblée annuelle des membres de l’ IG-Milch
Samedi, le 19 novembre 2011, la présidente d’IG-Milch, Erna Feldhofer, a après une année à la tête de la fédération, présenté son rapport d’activités de l’année passée. Il a été relaté les nombreuses manifestations et actions de protestation organisées en Allemagne, Belgique, Autriche et Suisse puis les 600 personnes présentes ont été informées sur le lait « Freie Milch Austria » et l’élargissement programmé de la gamme des produits « À faire Milch ». Il est prévu de bientôt commercialiser en supermarché, en plus du lait équitable « A faire Milch », un beurre équitable « A faire Butter » . Lars Hoelgaard a souligné une fois de plus qu’à l’avenir le prix du lait devait être régulé par des organisations de producteurs et que les quotas seraient supprimés. Graefe zu Baringdorf a dans son discours secoué les producteurs pour les exhorter à prendre chacun leur destin en main. Il a fait comprendre que le prix du lait à la production ne peut être garanti que par une régulation de la production.
« Il dépend de nous de continuer le combat pour finir par gagner…. »
Ce sont 900 producteurs laitiers qui sont venus le 22/11/2011 à Avranches en France pour participer à l’assemblée de l’Office du lait, une organisation interprofessionnelle qui a été mise sur pied par les producteurs laitiers français. L’objectif de l’Office du lait est d’offrir une plate-forme où tous les acteurs du marché collaborent en se basant sur des prix du lait rémunérateurs. Ce sont actuellement les éleveurs et les consommateurs qui en sont le moteur. Paul de Montvalon, président de l’Office du lait, souligne dans son discours qu'il faut une coopération proche entre l’Office du lait, le France Milk Board et les organisations qui défendent la position des producteurs laitiers devant le monde politique, comme par exemple l’ APLI et l’OPL pour que les producteurs de lait aient du succès. Alice Endres, représentante du MEG, le Milch Board allemand, parlait surtout de la position des producteurs sur le marché: « Il faut regrouper le lait avant d’entamer les négociations face à la laiterie afin d’obliger les transformateurs à payer un prix équitable ».
Régulation de l’offre sur le marché laitier américain
Le 13 juillet 2011, Collin C. Peterson a soumis au débat la proposition de loi « House Dairy Security Act of 2011 ». Tandis que certains responsables politiques d’influence, l'organisation des coopératives pour la commercialisation du lait et une partie des fédérations agricoles traditionnelles soutiennent cette proposition de réforme, un grand nombre d’organisations de producteurs sont sceptiques et l’industrie laitière aussi semble rejeter ce concept sous sa forme actuelle. Une étude de l'Université Wisconsin a analysé les répercussions que pourra avoir le Dairy Security Act : « Les réformes pourraient entrainer une baisse du prix du lait américain sw 92$Cent / cwt, les programmes de régulation de la production seraient activés dans 40-45% des périodes d’une année et les revenus nets des exploitations baisseraient de 32 à 48% . » La proposition de loi ne contient donc pas de régulation de l'offre au profit des producteurs.
Conseil de lecture : « Die Kuh ist kein Klimakiller » (La vache ne tue pas notre climat)
Les bovins émettent en digérant du méthane et le méthane est 25 fois plus nocif pour notre climat que le CO2. Mais les bovins sont indispensables pour la sécurité alimentaire mondiale en contribuant à maintenir la fertilité des sols et à limiter le changement climatique : en élevage sur prairie, les ruminants peuvent permettre d’emmagasiner du carbone en tant qu’humus dans le sol. Les plus hautes émissions viennent de l’engrais synthétique des grandes monocultures maïs et graines de soja. Ce livre met en question tout le système et ne se contente pas de réhabiliter la vache : il met en évidence la multifonctionnalité du complexe sol-plante-animal dans l’agriculture durable, cite les données scientifiques et donne la parole à des personnes qui avec les connaissances du 21e siècle misent de nouveau sur les potentiels symbiotiques de l’économie pastorale avec vache et cie.
Conseil de lecture en chiffres : « Milch und Milcherzeugnisse in der Europäischen Union » (Le lait et les produits laitiers dans l’Union europeenne)
Le secteur du lait est au sein de l’Union européenne (UE) d’une grande importance pour une foule de raisons. La première chose qui saute aux yeux est le fait que tous les États membres de l’UE produisent du lait. Dans de nombreuses régions de l’UE qui présentent une valeur particulière pour l’agriculture ou pour l’environnement (p.ex. les régions de montagne), le secteur laitier est le secteur le plus important. L’élevage laitier a marqué des paysages de son empreinte. Le secteur laitier revête donc ici une importance qui dépasse de loin les statistiques. De nombreuses régions rurales doivent leur caractère spécifique à l’élevage laitier et un secteur laitier florissant est important pour l’économie et l’emploi.
Conseil de lecture : Indignez-vous!
« 93 ans. La fin n est plus bien loin. Quelle chance de pouvoir en profiter pour rappeler ce qui a servi de socle à mon engagement politique : le programme élaboré il y a soixante-six ans par le Conseil National de la Résistance ! » Pour Stéphane Hessel, le « motif de base de la Résistance, c était l'indignation. » Certes, les raisons de s'indigner dans le monde complexe d'aujourd'hui peuvent paraître moins nettes qu'au temps du nazisme. Mais « cherchez et vous trouverez ».
Calendrier « Vaches 2012 » avec Amélie, Regina et beaucoup d’autres
La vache de la couverture a un nom, comme toutes ses collègues des douze mois, ce qui donne une note humoristique aux photos pleines de vie. Des calendriers sont également proposés dans le même style avec des « Oies et canards », des « Ânes » et des« tracteurs classiques ».
Poème: Une montagne de beurre dans une mer de brouillard
Là où les montagnes de beurre culminent
il ne peut pas y avoir famine
ça, c’est évident tu crois
mais la famine ailleurs ira
Si ces montagnes culminent trop
Aux autres on pourrait bien les repasser
Pour génialement se débarrasser
D’un seul grand coup de deux grands maux
Cette ineptie, il suffirait de la charrier
Hors taxe, au-delà de nos frontières
C’est le classique chassé-croisé
Du trafic frontalier sans barrières (...)
Calendrier EMB
Ici quelques rendez-vous importants du comité directeur de l’EMB:
2011-15-12: Rendez-vous avec le ministre d’Agriculture hongrois à Budapest
2011-12-12: Rendez-vous avec le ministre d’Agriculture bulgare à Sofia
2011-06-12: Groupe consultatif „Lait“ à Bruxelles
Textes Complets
Actions réussies : « Non pas brader les excédents de beurre mais les éviter »
Plus d’une soixantaine de producteurs se sont rendus le 29 novembre 2011 à la frontière germano-suisse à Bâle pour montrer que des deux côtés de la frontière on est opposé au dumping à l’exportation bradée du beurre. Cette action avait pour contexte l’envoi depuis la Suisse vers l’Allemagne et la France de produits allégés à base de beurre.
Les éleveurs suisses y sont deux fois de leur poche : en obtenant des prix bas pour leur lait et en versant des prélèvements obligatoires supplémentaires pour la subvention des exportations. Dans les États européens, mais aussi dans le monde entier, ces volumes supplémentaires peuvent entraîner des distorsions sur les marchés déjà saturés et ainsi faire encore baisser les prix à la production. La première cause de ce problème est la surproduction en Suisse et dans l’UE, c’est-à-dire le manque d’une régulation efficace des volumes de lait qui serait gérée par les producteurs.
Samuel Spahn d’Uniterre, fédération membre de l’EMB qui avait lancé l’action depuis le côté suisse : « Le commerce avec du beurre bon marché nuit aux éleveurs des deux côtés de la frontière, c’est pourquoi il nous faut agir ensemble. Cette action symbolique explicite très bien le problème. » En Suisse aujourd’hui, l’organisation de la filière laitière par l’Interprofession Lait (IP Lait) ne fonctionne absolument pas, ajoute-t-il, se montrant d’accord sur ce point avec son collègue Martin Haab de BIG-M. En raison d’une décision du Conseil fédéral, il n’est plus possible, comme l’avaient demandé les deux fédérations, de réguler les volumes laitiers au niveau de la production mais seulement d’exporter les excédents à l’aide des prélèvements obligatoires des éleveurs. La pression sur les prix reste élevée en raison de la surproduction persistante, de plus en segmentant le prix du lait, les transformateurs ont réussi à le faire encore baisser. Ainsi, la laiterie Emmi compte maintenant à partir de 2012 payer le prix A, le prix normal, seulement pour 65 % du lait, le prix B, un prix plus bas, pour 25 % et traiter le reste en lait C. Mais comment la laiterie peut-elle dès aujourd’hui savoir comment sera en 2012 la situation de commercialisation qui détermine cette segmentation ? !!
Les affaires avec les importations-exportations marchent bien – mais pour qui ?
«Un bon beurre hollandais ! Achetez-le ! Moins cher et meilleur que le beurre suisse », tel était le slogan que répétait inlassablement le pseudo distributeur laitier des Pays-Bas. Et le directeur gérant d’Emmi se promenait brandissant outre d’innombrables billets de banque une pancarte avec l’inscription « Les produits suisses se vendent bien sur le marché de l’UE et le marché mondial. » Était bien sûr aussi de la partie le distributeur laitier qui vendait du beurre de marque allemand. L’entente était parfaite entre les gens d’affaires et le marchandage allait bon train avec les faux douaniers.
Le beurre suisse a été transféré sur le côté allemand de la frontière où se trouvaient les producteurs allemands brandissant de grandes pancartes qui prenaient alors ce beurre pour le ramener en Suisse. Ulrike Minkner d’Uniterre : « Il nous faut une régulation des volumes gérée par les producteurs qui permette une production laitière rémunératrice et adaptée à la demande. En Suisse et dans l’UE. Et nous montrons aujourd’hui en organisant cette action que nous ne nous laissons pas nous mettre en concurrence les uns des autres. » Aussi les pancartes affichaient-elles : « Pour une régulation de la production adaptée au marché et gérée par les producteurs » - « Contre un dumping à l’exportation et une surproduction organisée » - « Contre les baisses du prix du lait – Pour des prix équitables ». Franz Schweizer de la BDM, la fédération allemande des producteurs laitiers a commenté cette action ainsi : « C’était une excellente action qui a trouvé un grand écho dans les médias, je me félicite de cette formidable performance solidaire. »
À Genève aussi, une manifestation réussie avait été organisée à la frontière par les éleveurs des fédérations suisses Uniterre et BIG-M et de la fédération française APLI. Ils ont arrêté pour un court moment la circulation routière pour tenir une conférence de presse au milieu de la chaussée. Cette action a aussi suscité un grand intérêt dans la presse. Ulrike Minkner d’Uniterre a ainsi résumé cette journée : « Il me tarde déjà de voir la prochaine action commune des producteurs allemands et français des fédérations AbL, BDM, APLI et Confédération Paysanne. Car celle d’aujourd’hui était une véritable réussite. »
Sonja Korspeter, EMB